Fiche Actualité

Le Negative Split

Date : 14/11/2009

LE NEGATIVE SPLIT

 

BOXEZ INTELLIGEMMENT : UTILISEZ LE NEGATIV SPLIT !
La stratégie* en combat, est le domaine systématiquement éludé par les revues spécialisées. Et pour cause ! Comment donner des conseils utiles à tous, et ce, quelles que soient les caractéristiques de chacun ? C’est pourtant possible en établissant des bases simples de compréhension du combat. Suivons ce mois ci Franck Martini sur une piste méconnue en boxe. C’est celle d’une stratégie simple, efficace et logique, issue des expérimentations américaines et russes en préparation physique : le "Negativ Split".

LE SYNDROME TYSON :
Un combat, s’il n’est pas décisif dans la carrière, doit être perçu comme une marche afin d’accéder à un niveau supérieur. Malheureusement on constate aujourd’hui que nombreux sont les combattants victimes du syndrome « Tyson » : ceux-ci affichent le désir de gagner « avant la limite » alors que leur profil technico-tactique n’y correspond pas toujours. Ils veulent réussir rapidement, quitte à sauter des étapes décisives dans le « savoir boxer », alors que l’on sait que la construction progressive de l’expérience, qui n’arrive à maturité qu’à partir bien souvent de sept années de pratique à un niveau donné, ne peut faire l’impasse sur les compétences stratégiques au risque de voir leur carrière fatalement se limiter.

PROGRESSER RAPIDEMENT EN STRATEGIE :
Etre un stratège, c’est donc toujours procéder à une analyse rigoureuse de ses armes et de ses faiblesses pour, le jour J, être capable de maximiser son potentiel, en évitant de tomber dans les pièges dans lesquels on sait être moins compétent.
Nous allons nous intéresser au domaine le plus simple à exploiter : celui du bio-énergétique : la stratégie la plus évidente pour chacun de nous, va être celle de ne jamais aller au maximum du seuil où la fatigue ne nous permet plus d’effectuer des choix lucides.

D’OU VIENT LA FATIGUE EN BOXE ?
Dans un affrontement équilibré entre deux boxeurs, l’organisme fatigué "souffre" car ne parvient pas à garder durant l’opposition, la même faculté d’oxygéner ses muscles. Le rendement (nombre de coups par minute, ou baisse de puissance pour le même nombre) se dégrade car l’acide lactique produit par les muscles déficitaires en O2, va alors interférer dans les contractions pour les rendre plus douloureuses et plus lentes. Un indicateur fiable est alors la hausse accélérée de la fréquence cardiaque (FC). En effet, le cœur va battre plus vite pour tenter d’apporter via le sang déjà acidifié, de l’O2 aux muscles qui eux aussi voient leur PH chuter dramatiquement

COMMENT SAVOIR SUR LE RING SI VOTRE EFFORT EST TROP VIOLENT ?
Prenez l’habitude d’estimer seul votre propre souffrance physique sur une échelle de 0 à 20. Ensuite, opérez à chaque séance, lors d’un exercice test, un parallèle entre, votre estimation personnelle (note sur 20 multipliée par 10), et votre fréquence cardiaque réelle (FC sur 15 secondes X 4, FC sur 10 X 2 dans les efforts violents ou mieux, au cardiofréquencemètre).
Un effort très pénible doit correspondre à 18/20, soit une FC de 180 battements par minute par exemple pour un boxeur de 20 ans. Petit à petit vous allez être de plus en plus précis et être capable de faire la différence entre 18,5 et 19. Ensuite, repérez, en situation d’opposition test, la FC à partir de laquelle vous sentez que vous avez du mal à récupérer. Cette phase seuil, cette "zone rouge", matérialise votre niveau d’acceptation physiologique de la douleur, et va être fondamentale dans la construction d’une stratégie efficace. Elle peut être très haute si vous êtes entraîné, ou très basse si vous reprenez une activité régulière. Généralement à 80% de Fcmax cela devient douloureux, et la zone rouge cible les 90% dans la plupart des cas. On sait que les combattants réagissent différemment aux même taux d’acide lactique. Certains acceptent plus de "douleur ressentie" que d’autres. On pense d’ailleurs que c’est la sensation de douleur provenant de la baisse du PH qui est responsable des phénomènes de renonciation.

ATTENTION ! En boxe pieds poings, la FC Max est bien supérieure aux données classiques : à celles du footing de 10 à 15 battements en moyenne, bien davantage en vélo (près de 20), comme à la FC Max définie par les données physiologiques classiques chez l’homme (220-âge), ou la femme (226-âge).
Et en anglaise la FCmax est plus basse qu’en pieds poings…(question de masse musculaire mobilisée).

COMPRENDRE LE NEGATIV SPLIT :
En démarrant trop vite dans un combat (hausse rapide vers votre "FC seuil"), vous allez produire cet acide lactique qui va vous handicaper, car vous n’allez jamais l’éliminer réellement**, même pendant les repos qui sont bien entendu trop courts pour récupérer complètement votre potentiel. Et si votre pari est de conclure rapidement, et que cela ne se produit pas, (cf Lebanner vs Hoost au K1 1999), il est impératif pour vous que l’intensité du combat diminue afin que l’O2 parvienne en plus grande quantité aux muscles. En clair : il vous faut revenir à une activité proche de l’endurance …ce qui n’est jamais le cas ! Ainsi, lors d’un démarrage trop rapide, si l’autre est capable de vous résister, vous serez tous les deux en danger, car vos niveaux de lucidité respectifs seront affectés. Et alors tout peut arriver !…

QUE FAIRE ?
Il faut tout simplement découper le combat en deux parties égales : selon la méthode du Negativ Split que nous appliquons à la Boxe, la deuxième doit être réalisée plus intensément que la première.
Cela nécessite dans la première partie :

  • de la mobilité positive (pour éviter un affrontement trop direct rapidement)
  • de la lucidité (savoir quand l’autre, par son pressing, peut vous faire basculer en « zone rouge », c’est à dire au delà de votre FC seuil. Ex : 18,5/20)
  • de la souplesse et du relâchement (pour favoriser la circulation sanguine)
  • de boxer en séries courtes et séparées (pour ne pas s’épuiser)
  • de rechercher plus la vitesse (V) et la précision, que la force (F) ou la puissance (FXV)
  • de varier les trajectoires (afin de ne pas sur solliciter les mêmes groupes musculaires)
  • de bien s’oxygéner en se relâchant « hors distance », et d’éviter les phases d’apnée
  • d’expirer sur tous les coups, et d’effectuer de grandes et profondes expirations avec le ventre pendant la minute de repos.

ET ENSUITE ?
Dans une deuxième étape (entraînement physique proprement dit), il faudra être capable d’augmenter progressivement les intensités de travail, sans toutefois niveler le décalage entre la première partie et la seconde.
Mais à présent, dès lors que vos propres données sont établies (FC seuil et estimations de la "zone rouge"). Utilisez les et réajustez les afin de mieux vous connaître, de vous donner un moyen simple de maîtriser efficacement la durée et l’intensité de vos combats, tout en progressant stratégiquement.
C’est le seul moyen de garder un contrôle rigoureux de votre évolution énergétique, et de progresser rationnellement !…

* La stratégie constitue l’ensemble global des procédures que le combattant met en place, d’une façon consciente, en fonction de ses points forts et de ses points faibles.
** On estime à 48 heures le temps de récupération d’une « séance lactique » !…

Le 30 août 2006, par Franck Martini.


Partager cette page :